Riad SATTOUF, Le jeune acteur 1

Les Livres du futur, Roman graphique publié en septembre 2021

Dessins et couleurs : Riad Sattouf

Scénario : Riad Sattouf, d’après les histoires vraies de Vincent Lacoste

144 pages

Riad Sattouf : « Une des images que je préfère, qui me fait le plus voyager, c’est tout simplement la page de garde des albums de Tintin d’Hergé… »

Ce roman graphique est une révélation ! J’avoue que le succès de L’arabe du futur, avec ses 5 tomes de retard et ses 2,5 millions d’exemplaires, paradoxalement, ne m’avait pas incité à m’y intéresser. Le hasard et ses messagers providentiels m’ont permis de découvrir un petit chef-d’œuvre dans un objet nouveau pour moi et c’est jubilatoire !

Voici ce que j’ai longtemps considéré comme la bande dessinée type : une cinquantaine de pages, des bulles avec un texte court, voire pas de texte du tout, afin de laisser beaucoup de place au dessin qui devait être savamment coloré et riche graphiquement.

Là, le format m’a fait prendre conscience de ce que pouvait être le roman graphique : 144 pages soit un vrai livre, des bulles où le texte prend le plus souvent la moitié des cases et même plus – les rares cases sans texte se repèrent immédiatement et du coup font mouche.

Riad Sattouf raconte et dessine les péripéties liées à la réalisation, en 2008, de son premier film. Il choisit comme rôle principal Vincent Lacoste, timide et complexé, jeune collégien qui arrive un peu par hasard au casting. C’est l’histoire d’un adolescent plutôt banal, devenu à partir de cette rencontre fondatrice, un des acteurs les plus talentueux et demandés du moment.

L’auteur parle de lui-même à travers Vincent Lacoste. Les péripéties vécues par Hervé, le personnage du film, sont aussi les siennes quand il avait le même âge. Riad Sattouf, tout comme Vincent-Hervé, rêvait d’être célèbre et se trouvait moche à l’adolescence vers ses 14 ans. Le réalisateur le prend peu à peu sous son aile protectrice dans une sorte de relation père-fils…

Au départ tout commence avec « Je m’appelle Riad Sattouf » qui se présente et raconte en une trentaine de pages le choix, difficile, de son acteur principal, puis vient le cœur du livre avec « Je m’appelle Vincent Lacoste », récit du jeune acteur par lui-même, et enfin une dernière partie avec les conséquences pour l’un et l’autre… Scénario maîtrisé de superbe manière par le maître !

Le lecteur découvre ici une magnifique illustration des coulisses du cinéma, les castings, le tournage, les problèmes à régler, les doutes, les rapports entre acteurs débutants et leur confrontation avec les acteurs célèbres. Le passage de l’anonymat au statut d’acteur en vue, la responsabilité du réalisateur face à un jeune qui entre dans un univers tellement différent de tout ce qu’il a connu auparavant sont particulièrement bien évoqués. C’est précis, très intéressant et excessivement drôle. Oui, j’ai beaucoup rit !

« Donc, on tourne l’été prochain, interdit de se casser un bras ou de mourir dans les 3 prochains mois. » … « Tu continues à bosser à l’école, c’est obligatoire, tu dois avoir le brevet cette année sinon je te vire direct ! »… « Tu prends pas le melon non plus ! Sinon je te vire aussi et je trouve quelqu’un d’autre, j’ai aucune pitié avec les frimeurs ! »

Dans la foulée, j’ai eu envie de découvrir son film Les beaux gosses, césar du premier film en 2010 et plus d’un million d’entrée ! J’ai aimé retrouver Vincent Lacoste en collégien propulsé dans ce film, pas vraiment à son avantage, le vivre à la lumière des confidences et secrets de tournage du roman graphique. Mais franchement, si voir le résultat des situations évoquées dans Le jeune acteur – et Vincent Lacoste en ado mal peigné, habillé de même – m’a intéressé, je préfère de loin le Riad Sattouf auteur de BD. Son deuxième film, Jacky au royaume des filles en 2014, n’a pas connu le succès, alors que les ovations du public pour son œuvre graphique sont impressionnantes. Il aurait rêvé d’être le nouveau François Truffaut, il devient un nouvel Hergé, ce n’est pas mal, non ?

Riad Sattouf est né à Paris en 1978 d’un père syrien, docteur en histoire, et d’une mère française d’origine bretonne. Il passe son enfance en Libye puis en Syrie avant de revenir en France à l’âge de 12 ans, enfance racontée dans L’arabe du futur. Il effectue sa formation aux beaux-arts puis plusieurs écoles graphiques. Il est passé par Charlie Hebdo et est l’un des rares auteurs à avoir gagné à deux reprises le Fauve d’or du meilleur album de l’année au Festival International de la bande dessinée d’Angoulême avec Pascal Brutal 3 en 2010 et L’Arabe du futur 1 en 2015. Pour cette nouvelle série, il a créé sa propre maison d’édition : Les livres du futur.

Vincent Lacoste est un acteur qui me plaît beaucoup. Il confirme, dans ses derniers films,  dans les registres différents l’étendue de son talent : le comique et la dérision dans « Illusions perdues » de Xavier Giannoli et le tragique poignant  dans « De nos frères blessés » de Hélier Cisterne.

Je suis déjà curieux de voir ce que Riad Sattouf va trouver pour le tome 2. Nul doute que cette amitié singulière, unique dans son genre, va continuer de m’enchanter. Maintenant j’ai bien envie de lire L’arabe du futur…  

Notes avis Bibliofeel mai 2022, Riad Sattouf, Le jeune acteur 1

6 commentaires sur “Riad SATTOUF, Le jeune acteur 1

  1. Bonjour,
    J’ai aimé aussi. J’ai eu la chance de pouvoir assister à un entretien avec Vincent Lacoste et Riad Sattouf à sa sortie, et c’était vraiment agréable et intéressant = la complicité entre ces deux-là est très touchante…

    Aimé par 2 personnes

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.